De la différence entre les objectifs généraux énoncés par le préambule d’un pacte d’actionnaires et les clauses claires et précises de ce pacte.
En l’espèce, une société avait fait l’objet d’un rachat dans le cadre d’un (LBO) par un investisseur. A l’occasion de ce rachat, le dirigeant de cette société a pris une participation minoritaire dans le capital et signe un pacte d’actionnaires avec l’investisseur.
Ce pacte comportait un préambule selon lequel le partenariat ainsi organisé avait pour objet de valoriser, à moyen terme, l’investissement des parties, sans cession ni démantèlement à court terme. Ce pacte comportait également la promesse, par le dirigeant, de céder sa participation à l’investisseur au cas où il viendrait à cesser ses fonctions dans la société. Trois ans après, le dirigeant est révoqué et l’investisseur lève sa promesse de vente. Le dirigeant estime que sa révocation et la levée de sa promesse sont bien trop précoces et, en cela, contraires aux termes du préambule de leur pacte. Il demande réparation du préjudice consistant dans le fait qu’il a ainsi été privé de la valorisation de ses parts, telle qu’elle serait normalement apparue au terme normal du LBO.
Sa demande est rejetée au motif que l’objectif général exposé dans le préambule ne peut empêcher l’exécution des clauses claires et précises du pacte.
Il est à noter que le dirigeant invoquait également la nullité de la promesse consentie dès lors qu’elle était souscrite sous une condition, sa révocation, dont la réalisation dépendait de la seule volonté de l’investisseur. Or, est nulle l’obligation contractée sous une condition dont la réalisation dépend de la seule volonté du débiteur (C. civ., art. 1174, devenu art. 1304-2). En l’espèce, était invoqué le fait que la réalisation de la condition dépendait du seul créancier, le bénéficiaire de la promesse de vente.
Le dirigeant aurait utilement pu invoquer la jurisprudence selon laquelle la condition suspensive est réputée non réalisée si sa réalisation résulte d’une manœuvre déloyale du bénéficiaire de sa promesse (Cass. 3ème civ., 11 févr. 2014 n° 12-28.810). Toutefois, comme le constate la Cour, la révocation du dirigeant ne dépendait pas de la seule volonté de l’investisseur, mais d’une décision collective des associés et de celle du comité de surveillance.
CA Paris, ch. 5-8, 29 sept. 2016, n° 15/07864