La violation d’un droit de préemption conventionnel sur des droits sociaux est sanctionnée par des dommages-intérêts lorsque son exécution est devenue impossible.
Les associés de trois sociétés exploitant des magasins de bricolage sous contrat de franchise avaient souscrit un pacte de préemption au profit du franchiseur. Ce dernier, informé par les associés de leur volonté de vendre leurs titres, a exercé son droit de préemption. Les associés ont toutefois cédé leurs titres à une société tierce. Ultérieurement, les trois sociétés et la société cessionnaire sont absorbées par une société concurrente du franchiseur.
Conformément à sa demande, le bénéficiaire du pacte de préemption obtient la condamnation in solidum des associés et de la société absorbante à lui verser de lourds dommages-intérêts destinés à l’indemniser :
– de la perte de la chance de tirer profit des titres et de se développer ;
– de la concurrence déloyale dont il a été victime, la cession faite en violation de son droit de préemption lui ayant fait perdre toute présence de sa marque dans les secteurs géographiques concernés.
Cette décision, rendue sur le fondement des dispositions du code civil antérieures au 1er octobre 2016, vaut également sous l’empire des dispositions issues de l’ordonnance n° 2016-131, du 10 février 2016.
Selon ces dispositions, la violation d’un pacte de préférence (donc d’un droit de préemption conventionnel, en cas de pacte relatif à une vente du fait de la conclusion du contrat avec un tiers est sanctionnée par des dommages et intérêts (C. civ., art. 1123) qui sont, en général, de la perte subie par le bénéficiaire du pacte et du gain dont il a été privé (C. civ., art., 1231-2 et art. 1240 et s.).
En outre, lorsque le tiers acquéreur connaissait l’existence du pacte et l’intention de son bénéficiaire de s’en prévaloir, ce dernier peut également agir en nullité de la cession faite en violation de ses droits ou demander au juge de le substituer au tiers dans le contrat de vente conclu (C. civ., art. 1123, al. 2). En l’espèce, les titres visés par le pacte de préemption ayant disparu du fait de l’absorption des sociétés émettrices, l’exécution en nature du pacte était devenue impossible (C. civ., art. 1221). L’obligation de faire (en l’espèce, restituer les titres) étant impossible, elle se résout en dommages-intérêts.
Cass. com., 20 sept. 2016, n° 15-10.963 F-D